Le mercredi 12 novembre 2025, une réunion de haut niveau a eu lieu à Kinshasa, réunissant des responsables congolais, particulièrement le Vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur, de la Sécurité et des Affaires coutumières, Jacquemin Shabani Lukoo, ainsi que la ministre d’État des Affaires étrangères, Thérèse Kayikwamba Wagner, et une délégation française dirigée par Frédéric Jung, Responsable des Nations Unies au ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères, avec également la présence de Rémi Maréchaux, Ambassadeur de France en République démocratique du Congo. L’objectif principal était de discuter du renouvellement du mandat de la MONUSCO et des attentes de la RDC à l’égard de cette mission internationale.
D’emblée, le ton est donné : la République démocratique du Congo exige un rôle défini pour la MONUSCO, non plus en tant qu’« actrice unique », mais en tant que véritable partenaire dans la transition sécuritaire. De plus, elle souhaite affirmer sa souveraineté et son autorité sur le territoire, tout en sollicitant un soutien adéquat de la part de la Communauté internationale et particulièrement de la France.
La MONUSCO est engagée en RDC depuis de nombreuses années, jouant un rôle crucial dans la protection des civils, la stabilisation et l’appui aux réformes dans différents secteurs. Toutefois, la situation sécuritaire dans l’Est du pays et le long des frontières demeure très alarmante. Les autorités congolaises estiment qu’il est temps de repenser l’intervention de la MONUSCO pour qu’elle soit plus adaptée aux réalités sur le terrain et à l’évolution de la stratégie nationale.
Lors de cette rencontre, la RDC a exprimé ses attentes : une transition soigneusement planifiée du rôle de la MONUSCO vers les forces congolaises, avec un transfert des responsabilités qui soit à la fois graduel et tangible ; une clarification des missions toujours essentielles : protection des civils, soutien aux forces nationales, mais aussi abandon de la posture « par défaut » d’une mission de longue durée ; une attention portée aux priorités nationales, notamment en ce qui concerne la sécurité, la gouvernance et le maintien de l’intégrité territoriale, comme l’a souligné l’ambassadeur Maréchaux : « On ne peut pas appliquer des standards différents… il ne peut pas y avoir de défense de l’intégrité territoriale de l’Ukraine sans défendre celle de la RDC ».
Enfin, une volonté de créer un partenariat plus équilibré avec la France et l’ONU, où la RDC ne serait plus seulement réceptrice, mais surtout actrice majeure.
La délégation française, dirigée par Frédéric Jung et Rémi Maréchaux, s’est engagée à prendre en compte les revendications de Kinshasa et à les porter auprès des Nations Unies en préparation du prochain renouvellement du mandat de la MONUSCO. Il est évident que la France souhaite maintenir un rôle central dans le processus de paix et de sécurité en RDC, tout en respectant les orientations dictées par l’État congolais.
Par ailleurs, cela s’inscrit dans un cadre plus large de collaboration bilatérale renforcée : la France souhaite devenir partenaire de la RDC dans des secteurs essentiels tels que l’énergie, l’agriculture ou la gouvernance.
L’enjeu est significatif : le renouvellement du mandat de la MONUSCO doit s’effectuer dans un cadre qui satisfait à la fois les véritables besoins du pays et la nécessité d’obtenir des résultats tangibles. La période actuelle du mandat a été étendue jusqu’au 20 décembre 2025.
Cependant, au-delà de cette échéance, c’est la nature même de la mission qui est remise en question : modalités d’intervention, zones d’activité, coordination avec l’État congolais, étendue territoriale, ressources logistiques et stratégiques. Le défi est double : prévenir un vide en matière de sécurité tout en affirmant la souveraineté nationale, sans retomber dans une dépendance prolongée.
Équilibres de pouvoir, enjeux régionaux, logique d’intervention internationale : la rencontre du mercredi dernier n’a pas été simplement un échange protocolaire. Elle représente un tournant politique : la RDC manifeste son désir de reprendre le contrôle de sa sécurité, et la France accepte de l’accompagner selon de nouvelles conditions.
Les observateurs y verront une reconnaissance implicite que la MONUSCO ne peut pas demeurer indéfiniment la force principale sur le terrain. Comme l’a mentionné une déclaration précédente : « une délégation française … recueillir les évaluations et les recommandations du Vice-premier ministre … pour élaborer un projet de résolution en adéquation avec les attentes du gouvernement congolais ».
Au-delà des applaudissements diplomatiques, ce sont véritablement des choix stratégiques qui se dessinent à Kinshasa. La RDC a exprimé « nous voulons », et la France a répondu « nous sommes disposés à vous soutenir sous ces conditions ». Reste désormais à convertir cette intention en résultats tangibles : un mandat de la MONUSCO aligné avec la vision de l’État congolais, une transition réussie vers la responsabilité nationale, et une coopération internationale qui ne soit plus une simple aide, mais un véritable levier stratégique.
Dans cette optique, la réunion du 12 novembre 2025 pourrait être perçue comme le commencement d’un nouveau chapitre dans les relations entre la RDC et la France, ainsi que dans l’histoire de la stabilisation nationale en RDC.
J-P E
La rédaction


