Le manger bio : Une recommandation qui peine à s’appliquer dans la cuisine kinoise

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L’histoire renseigne que depuis 1980, les chinchards ou poissons maquereaux appelés communément thomson devirent une alimentation de base dans plusieurs foyers de la capitale zaïroise alors qu’autrefois ils étaient destinés aux foyers à faible revenu.
On assimilait ces poissons aux appareils électroménagers Thomson, une marque à succès de cette décennie.

Aujourd’hui, la consommation de ces poissons surgelés est devenue une habitude ancrée au sein de la population congolaise en générale, kinoise en particulier, une préférence au détriment des poissons d’eau douce. Tandis que le pays possède plusieurs espèces de poissons, cependant sa consommation reste concentrée sur un rang social donné.

À ce sujet, une question se pose : Pourquoi les Kinois préfèrent-ils les Thomson aux poissons produits localement ?
Pour y répondre, nos reporters sont allés à la rencontre des poissonniers se trouvant sur Kalembe-lembe dans la commune de Lingwala. Ici, la vente des poissons frais est l’activité phare de ce coin de la capitale. Les espèces rencontrées fréquemment sont le capitaine, le saoule, la perche, la dorade blanche et rouge, le barracuda, le tilapia, la langouste, des crevettes et tant d’autres espèces de poissons d’eau douce.
Un service sur mesure est proposé, le kilo varie entre 18.000fc et 25.000fc. des beaux poissons, cependant, pour une clientèle bien précise, a fait savoir Anatole, un des vendeurs .

« Il y a variété des poissons, mais nos clients sont souvent des personnes qui viennent des milieux nantis. Ce qui nous permet de réussir dans ce commerce, ce sont plutôt les partenaires de taille que nous avons, je cite : les hôtels, les restaurants, les sites touristiques mais rares sont les clients ordinaires qui se pointent pour acheter nos poissons » a-t-il dit.

Pour cet autre mareyeur, le prix et la quantité, face au pouvoir d’achat des Congolais, deux facteurs qui poussent plusieurs à privilégier les poissons surgelés appelés « thomsons ».
« Un seul poisson peut peser entre 3 et 5kg et si l’on multiplie par le prix d’1 kilo, déjà on atteint la somme de 58.000fc, voire 75.000fc pour un poisson. Difficile pour une famille nombreuse de se nourrir comme il se doit.

C’est pourquoi la ménagère a recours aux poissons surgelés, car elle sait qu’avec peu, elle peut nourrir sa famille. Donc le faible pouvoir d’achat des Congolais ne permet pas à tout le monde de manger bio ».
Malgré les difficultés liées au pouvoir d’achat, pour des raisons de santé, plusieurs préfèrent les poissons frais aux surgelés, le cas de ce client. « Les médecins nous recommandent de manger bio, mais c’est difficile de voir les gens respecter cette consigne. Certes, les temps sont durs, mais je me bats pour offrir à moi et à ma famille une alimentation saine, pas ces surgelés remplis de formol qu’on nous ramène des autres pays » a-t-il explicité

Loin de toutes contraintes, une frange de personnes interrogées, préfèrent le Thomson. « Nous sommes conscients de ce qui se dit sur les poissons surgelés mais il est question de préférence ici. Le Thomson, c’est bon et ça ne demande pas beaucoup d’efforts à les préparer, en plus c’est à la portée de tout le monde. Alors que les poissons frais contiennent du gluant et difficile pour mes enfants et moi d’en manger. Je prépare en petite quantité pour mon mari s’il en a envie, mais moi je n’en mange pas» explique Jeanne Lukusa.

Par ailleurs, la commercialisation des poissons frais reste confrontée à plusieurs défis, notamment par le mode d’approvisionnement, d’où un appel lancé au gouvernement afin de moderniser le secteur de la pêche et de réglementer des prix pour améliorer le pouvoir d’achat des congolais.

«Plusieurs facteurs ne favorisent pas la commercialisation des poissons frais surtout à des prix abordables. D’abord, nous pratiquons une pêche artisanale, que ce soit au niveau du fleuve, de nos lacs et surtout à l’océan là-bas à Moanda ; nous n’avons pas les bateaux de pêche, ce sont des villageois pour la plupart qui nous ramènent des poissons et nous nous approvisionnons auprès d’eux, difficile de nourrir l’ensemble de la population», a expliqué Thérèse, une mareyeuse rencontrée sur place.

Et d’ajouter, nous avons la douane, les tracasseries aussi et tant d’autres facteurs qui ne nous facilitent pas les choses. « C’est pourquoi, nous supplions l’Etat de nous doter de bateaux de pêche, ce qui nous permettrait de nous approvisionner en grande quantité, car nous avons les eaux partout qui ne sont pas suffisamment exploitées pour la pêche», a-t-elle renchéri.
Il sied de rappeler que le gouvernement congolais s’était engagé à redynamiser l’agriculture vivrière, industrielle et pérenne ainsi que la pêche et l’élevage à travers l’axe 34 du plan d’action du gouvernement, notamment par le secteur de la pêche, par l’exploitation et la transformation des ressources halieutiques locales. Selon la loi des finances publiques, les prévisions budgétaires arrêtées par ces secteurs sont chiffrés à 602,1 millions de francs congolais, soit plus de 299,2 millions de dollars.

Cependant , seuls 5,5 millions des francs congolais, soit près de 2 millions de dollars américains ont été débloqués en faveur du secteur de la pêche et élevage à fin juin , renseigne le rapport des états de suivi budgétaire de la direction générale des politiques et programmation budgétaire du ministère du Budget.
Margarita-Rosa Ngoy

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