Kinshasa, la ville la plus dangereuse du monde ?
Au fil des ans, la capitale congolaise s’est démesurément agrandie et sa démographie a connu une croissance démentielle. Aujourd’hui, Kinshasa s’étend pratiquement sur près de 80 kilomètres carrés tandis que sa population est estimée à près de 12 ou 13 millions d’habitants. Entretemps, les infrastructures routières, sociales, scolaires se sont dégradées et les constructions anarchiques ont pris le pas sur une vision urbanistique moderne.
Du coup, en matière d’habitat, Kinshasa ressemble aujourd’hui plus à un gros village sans routes en excellent état qu’à une capitale moderne. La desserte en électricité et en eau potable est insuffisante, malgré l’énorme potentiel hydroélectrique d’Inga et les ressources hydrauliques immenses. Les habitants, encouragés par une administration défaillante et passive, plus encline à encaisser des pots de vin qu’à effectuer consciencieusement leur travail, se sont lancés dans des constructions anarchiques dans tous les endroits : sur des sites non aedificandi, sur des caniveaux et égouts et même dans des cimetières.
Conséquences : des drames comme celui survenu après la pluie diluvienne du 12 décembre dernier qui a causé officiellement 169 morts, l’écroulement de plusieurs maisons et d’énormes dégâts matériels.
Quid du transport urbain ?
A Kinshasa, le transport en commun est démentiel. Aux habituels taxis et taxis-bus de tous les temps, est venue se greffer une nouvelle engeance : celle des motos-taxis. Cette nouvelle race est apparue depuis une bonne dizaine d’années, et à ses débuts, était essentiellement dominée par des ressortissants kasaïens, d’où le nom des « wewa » qui a été affublé à ses utilisateurs.
Avec la conjugaison de ces trois composantes ( taxis, taxis-bus et wewa », la circulation r. outière est devenue si encombrante, si dense que Kinshasa est devenue la capitale la plus dangereuse en ce domaine. En effet, les « wewa » se montrent les plus dangereux. Sans casques protecteurs, sans permis de conduire, ils n’hésitent pas à embarquer 3, voire 4 passagers, à enfreindre le sens de la circulation, et cela sous l’œil bovin des policiers de régulation routière. Qui plus est, ils sont grossiers dans leur comportement comme dans leur langage. En ce dernier domaine, ils ne le cèdent pas aux chauffeurs (des taxis) et receveurs des taxis-bus.
Que font donc les autorités du secteur du transport public à Kinshasa pour remédier à la situation ? Presque rien. De l’avis d’un taximan, Kinshasa n’a jamais été affublé d’un ministre provincial chargé du transport aussi amorphe que l’actuel. Depuis qu’il est en fonction, il n’a jamais pris l’initiative de rencontrer les responsables des associations des transporteurs en commun. Résultat, conclut-il, la cacophonie des tarifs de transport actuels. Un « wewa » renchérit : « tout ce qui intéresse les responsables du transport de la ville, c’est la taxe que nous payons journellement (500 FC). Pour le reste, ils ferment les yeux. Comment ne pas en profiter ? ».
Pour autant, Kinshasa n’en demeure pas la capitale la plus dangereuse au monde en matière de circulation routière. Près de 95% des routes principales et secondaires sont impraticables et en état de délabrement avancé. Et les choses s’aggravent quand il pleut. Les signaux routiers et les feux de signalisation sont presque inexistants, à l’exception de quelques robots. Les tracasseries policières viennent en rajouter à cette situation déjà explosive, créant des embouteillages dont la finalité, constatent les chauffeurs des taxis et taxis-bus, est de les « treizer ». Traduction : extorquer.
Kalume Ben Atar