Accord RDC – Dan Gertler

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L’Oncle Sam hausse le ton, Kinshasa observe !

A la présidence de la RDCongo,  c’est le désarroi. L’idée que les Etats-Unis d’Amérique vont incessamment  recourir à des sanctions contre tous ceux qui, dans l’entourage de l’homme fort de Kinshasa, ont joué un rôle dans la conclusion de l’accord avec Dan Gertler fait… gravement frémir !  Mais au palais de la Nation, il y en a, plus lucides, qui font observer que « le chef » a encore du temps devant soi pour arrêter l’orage.  Seul problème cependant : personne, dans cette foultitude de  conseillers ramenés au pays dans les valises de Félix Tshisekedi, n’est assez courageux pour affronter celui-ci  et lui en dire tout haut à voix haute afin de le faire changer d’avis sur ce que l’on a coutume d’appeler « The Gertler Deal ». C’est donc un Fatshi entièrement recroquevillé en lui-même et complètement isolé dans ses contradictions, qui s’entête dans ce dossier face à la toute puissante Amérique.  S’en sortira-t-il ?

L’enjeu du dossier

Pour démêler cette affaire qui semble de plus en plus préoccupante, au regard du spectacle dangereux de mésentente que nous livre Kinshasa et Washington,  il convient tout d’abord d’en situer  les enjeux. Pour chaque acteur impliqué, soit directement, soit indirectement, l’enjeu, dans ce dossier relatif aux actifs miniers et pétroliers du lac Albert,  est, faut – il le reconnaitre,  de taille.   Pour Dan Gertler,  il s’agit  de se soustraire des sanctions qui pèsent sur lui et ainsi continuer à faire des affaires en RDCongo et cela en développant notamment, disait une semaine après l’annonce du fameux deal,  « d’actifs vitaux pour l’avenir de l’économie congolaise ». Depuis 2017, l’homme d’affaires israélien est sous sanction américaine,  en raison de ses pratiques présumées de corruption.

Lesquelles auraient fait perdre au trésor congolais une bagatelle somme de 1,3 milliards de dollars américains.  Ce que conteste le concerné qui dit avoir toujours « cherché à agir dans le respect de la loi et des intérêts du peuple de la RDC ».  Peine perdue !  Car, les Américains maintiennent toujours leurs sanctions.   Ces derniers temps, ils auraient même recouru au service du redoutable FBI afin d’enquêter sur des éventuels contournements de leurs restrictions à l’encontre de celui qu’ils présentent comme un grand criminel économique de la RDcongo. 

Dans l’entretemps, des sanctions sont déjà annoncées contre quelques membres de l’entourage direct de Félix Tshisekedi, mais aussi du gouvernement, accusés d’avoir joué un rôle dans l’élaboration dudit accord.  Des sources diplomatiques évoquent cinq personnalités concernées par cette mesure.

Signe que les Américains sont prêts d’aller jusqu’au bout dans ce dossier. Mais contrairement au premier cité ou encore au pouvoir de Kinshasa, l’enjeu ici, pour l’Oncle Sam,  est  strictement stratégique, comme toujours, quand il leur arrive de déployer leur batterie de sanctions contre toute entité incriminée par eux pour des faits supposés de corruption.

Apparence sur le plan moral 

Au – delà de l’apparence morale de la lutte contre ce fléau, les Américains veulent donc, à travers Gertler,  reprendre pied dans les mines RDcongolaises afin de contrebalancer l’influence et la situation de quasi  – monopole de la Chine dans ce dernier pays.  Selon des statistiques, l’Empire du milieu  contrôle 70 et 80% respectivement de la production minière du cuivre et du cobalt au pays de Lumumba.  Quant au patron de Ventura Development, il vaut une bonne quantité d’actifs miniers, sans compter des redevances qu’il perçoit auprès des sociétés minières que sont  Gleencore, KCC, Mutanda et Metalkol.   Pour les Américains, tout ceci  représente une énorme possibilité de réaliser l’objectif stratégique évoqué ci – haut. Puisque, par toutes les possibilités que leur offre l’extra – territorialité de leur législation anti – corruption,  toutes ces sociétés minières finiront toutes  très certainement, comme à l’époque avec les françaises Alstrom et Alcatel, par devenir,  si pas directement  américaines, mais du moins sous leur contrôle absolu et exclusif.   C’est dire à point, l’arrangement signé avec l’Israélien qui est très dangereux pour le régime.

Fatshi l’aurait – il soupçonné ?  «Aucunement. Jamais ! En lui, croyez – moi,  pareille ambition n’existe nullement », nous assure un de ses conseillers.  Mais pourquoi, a – t – il alors fourré son nez dans cette affaire ?  Il faut alors croire que  l’enjeu ici doit  être très simple. En effet, sous la belle apparence de la récupération apparente d’actifs miniers et pétroliers valant- selon les calculs officiels – près de 3 milliards USD, ce deal offrirait  à l’ancien président de l’actuel parti présidentiel plutôt l’occasion tant rêvée qu’est de faire du bien à un juif quel que soit son crime, en application de sa foi chrétienne et de son appartenance à ces sectes qu’on nomme par ailleurs Eglises de  réveil, et que le Dieu de la Bible  lui en donnera beaucoup. 

Permettant notamment à cet étranger de devenir  son proche ami comme à l’époque avec Kabila.  De l’avis général,  Fatshi et ses hommes ont toujours été fascinés par la figure de l’Israélien Gertler. Pour eux, il serait  l’artisan à la base du long règne de Joseph Kabila, celui – là même qui aurait aussi négocié sa vie après la présidence, retombant étonnement de ce tsunami occidental dont la furie semble ne laisser aucune chance de survie à Kabila fils, comme c’est  le cas après avoir quitté le pouvoir. 

La raison profonde

Voulant rempiler pour un second mandat, malgré son bilan largement en deçà des attentes, Tshisekedi fils chercherait – il à s’assurer le soutien de la désormais bête noire des Américains ?  Une certaine presse répond déjà par l’affirmative.    Mais à la présidence, beaucoup estiment que cela est loin d’être le cas. Car, « dans ce  dossier, on  a plus à perdre qu’à gagner », estime notre source. Visiblement lassé de voir que les choses soient toujours à ce point figées alors que l’Amérique avait déjà exprimé son désaccord.  

Pour elle  donc, se mettre à dos les Usa à une année seulement  des élections générales est la pire des choses qui puisse advenir.  « En tout cas, ce n’est pas bon », assure- t – elle.  En référence certainement à cette doxa en vigueur au sein de la classe politique RDcongolaise,  selon laquelle  ne gagne à la présidentielle, ne rempile pour un second mandat que celui qui est adoubé par l’Oncle Sam.  D’où, l’émoi…

Une autre raison, qui illumine la première,  Fatshi aurait, pour l’instant, gaspillé toutes les chances d’un atterrissage en douceur de cette affaire avec les Américains.  L’expérience sur la tradition diplomatique de cette nation lui rappelle bien que face à un  allié stratégique ou supposé qui se compromet à leurs yeux, le pays de Joe Biden a toujours réagi par étapes. D’abord, un mot de rejet en bilatéral et/ou en multilatéral (par le biais de l’Onu ou des institutions de Breton Wood) puis, un temps d’observation pour voir si l’avertissement ou leur appel a été scrupuleusement respecté.

A l’affirmative, comme avec l’Afrique du Sud à l’époque de Nelson Mandela au sujet des missiles à la Syrie,  tout redevient normal.  C’est donc en dernier ressort, après le constat d’échec de cette première option, qu’ils en arrivent à l’artillerie lourde. Au propre comme au figuré.   Au départ de cette affaire, précisément après l’annonce de cet accord signé le 24 février dernier entre la partie gouvernement congolais et celle de la partie Ventura Development, l’administration américaine avait exprimé sa désapprobation via  son émissaire,  le secrétaire adjoint au trésor Nestor Bryan, qui était expressément dépêché à Kinshasa.

La signature controversée

En réaction, Félix Tshisekedi et ses hommes ont choisi la formule d’une table ronde- tenue du 13 au 14 juillet 2022- avec une trentaine des membres de la société civile et des ONG,  pour vanter avec ces derniers, à l’intention précise de l’administration Biden,  « un accord exemplaire » qui « préserve le climat des affaires et des investissements » auquel le gouvernement congolais et le patron de Ventura Development  sont particulièrement « sensibles » !

Puis, vint le Fonds monétaire international (FMI) avec la même demande, quoi que présentée sous la forme d’une des conditionnalités pour la poursuite de son programme avec le gouvernement congolais au titre de la Facilité Elargie au Crédit, et, récemment, le secrétaire d’état Antony Blinken.

Quand Georges Kapiamba se fait le relais

Le séjour du sexagénaire en Afrique coïncidant avec les rumeurs sur les sanctions contre quelques membres de l’entourage du chef de l’Etat congolais, on serait fondé de croire  qu’il pourrait s’agir là d’une  pression de Washington sur Kinshasa dans l’espoir de le voir  changer de cap dans ce dossier. Mais… nenni !   Car la semaine passée, ce pays de l’outre – atlantique  a été vigoureusement  remis dans ses souliers par le président de l’Ong Accès à la justice (Acaj) Georges Kapiamba dénonçant au passage ce qu’il qualifiait « d’ingérences américaines’ » dans les affaires internes de la RDCongo, mais aussi sa ‘‘posture coloniale’’. Homme de paille de toujours du parti présidentiel au sein de la société civile, celui – ci ne serait – il pas ici que le porte – parole de Fatshi? La question mérite bien d’être posée, au regard de la position qui demeure inchangée de la présidence, malgré… ces sanctions qui s’annoncent déjà à l’horizon.

J-P Ebonga

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